Moulins et Patrimoine
Alain PROUST

 

La génératrice à aimants permanents n’est pas une génératrice adaptée pour produire de l’électricité avec une roue de moulin (article actualisé en août 2012).

Nous sommes régulièrement sollicité par les propriétaires de moulins pour donner notre avis sur l’utilisation de génératrices à aimants permanents dans le but de produire de l’électricité au moyen d’une roue de moulin, système présenté comme une innovation.

Une société souhaiterait même notre collaboration pour installer ce type de génératrice. Nous sommes bien sûr sensible à sa confiance et à l’intérêt qu’elle porte à notre entreprise.

La génératrice à aimants permanents, dans un système de production d’électricité, présente des avantages par rapport à d’autres systèmes en raison de sa vitesse de rotation lente qui peut permettre l’économie d’un multiplicateur et parce qu’elle peut produire de l’électricité à des vitesses variables avec un bon rendement (seulement aux vitesses rapides, le rendement décroit rapidement aux vitesses lentes). Cette génératrice rend cependant nécessaire l’utilisation de convertisseurs sophistiqués. La génératrice à aimants permanents est particulièrement intéressante dans les éoliennes par exemple.
Malheureusement, ce type de génératrice n’est pas adapté aux roues des moulins pour lesquelles il présente plus d’inconvénients que d’avantages.

En effet, la vitesse nominale de rotation d’une roue de moulin doit être maintenue strictement constante quel que soit le débit d’eau. Le rendement d’une roue ( de 85 % en général pour les roues optimisées) diminue rapidement dès que l’on s’éloigne de cette vitesse nominale. Le rendement descend jusqu’à 2 ou 3 % par exemple, pour certains types de roues, si on multiplie par deux la vitesse nominale (soit une production négligeable). Cette particularité vient de l’impossibilité de faire varier le profil des aubes, contrairement aux éoliennes et à certaines turbines à pas variables qui peuvent ainsi tourner à des vitesses différentes en conservant un bon rendement.
Précisons d’ailleurs que les moulins équipés d’une roue n’ont pas une puissance inférieure à celle d’un moulin équipé d’une turbine, en raison de la faible vitesse de rotation d’une roue. Chaque moteur hydraulique a sa vitesse nominale, différente selon les installations. Les roues les plus performantes (85 à 90 % de rendement, soit plus que bon nombre de turbines de basses chutes) sont les roues les plus lentes !
L’utilisation d’un alternateur coûteux capable de produire de l’électricité à des vitesses variables ne présente donc pas d’avantages.
Les systèmes que nous avons retenus nous-mêmes permettent une vitesse constante de rotation des roues (variation de plus ou moins 1 %).

D’après les caractéristiques des génératrices à aimants permanents communiquées par les constructeurs (vitesse minimum de la génératrice), un multiplicateur est indispensable pour accoupler un alternateur à aimants permanents à une roue de moulin (l’accouplement direct sur l’axe est impossible) . Dans un multiplicateur, seul le premier étage (celui qui est directement accouplé à l’axe de la roue), en raison des couples importants dus à une vitesse de rotation lente, est onéreux, le coût du dernier étage étant négligeable par rapport au premier.
Le coût d’un multiplicateur est donc quasiment identique quel que soit le type d’alternateur utilisé. Aucune économie sensible n’est donc réalisée dans ce domaine avec l’utilisation d’une génératrice à aimants permanents.

Il reste la question de la régulation. Comme il est indiqué par les constructeurs, ce type de génératrice nécessite des équipements électriques sophistiqués (convertisseurs), qui sont donc inévitablement une source potentielle de dysfonctionnement et surtout qui sont beaucoup plus onéreux qu’un système basé sur une génératrice asynchrone.

Pour ces trois raisons, l’utilisation d’une génératrice à aimants permanents ne nous paraît pas adaptée dans un système de production d’électricité accouplé à une roue de moulin. Le coût d’un tel système serait supérieur à d’autres installations, avec des composants mécaniques et électriques plus complexes rendant inévitablement plus fragile l’installation, sans avantages réels.

 

D’autre part, la fabrication de générateurs à aimants permanents nécessite l’utilisation en grande quantité de « terres rares ». La production de ces « terres rares » est très polluante pour l’environnement et la question des déchets n’a toujours pas de solutions à ce jour. Certains pays (Etats-Unis par exemple) ont préféré pour ces raisons ne plus produire ces « terres rares » sur leur sol mais les importent de pays aux normes environnementales moins strictes (Chine).

Beaucoup de propriétaires de moulins sont sensibles aux questions environnementales. Ils doivent être informés de ces questions. Dans de nombreuses applications, « les terres rares » sont indispensables. Ce n’est pas le cas dans les sytèmes de production d’électricité accouplés aux roues de moulin où cette technologie est globalement moins performante que d’autres.

Il est bien sûr impossible d’entrer ici dans les détails et dans des questions techniques plus précises de couples, d’accouplement mécanique et de régulation (la fixation du rotor et du stator, délicate, par exemple).
N’ayant pas fait d’études approfondies sur les turbines et leur système de production d’électricité, nous n’abordons pas cette question.

Une société avait déjà essayé de développer ce concept, il y a quelques années, sans succès. Quelques petites installations semblent avoir été réalisées parce que des propriétaires nous ont fait part de leur déception quant à l’écart entre la puissance annoncée et la puissance réelle fournie, et le faible rendement de ces installations aux vitesses lentes.

 

Ne fabriquant aucun matériel, aucune génératrice, nous ne sommes attaché à aucun système en particulier, notre seul souci étant d’installer chez nos clients des ensembles parfaitement fiables au meilleur coût. Si les générateurs à aimants permanents nous étaient apparus pertinents pour produire de l’électricité avec des roues de moulin, nous les aurions utilisés.